Par Laurence Gossart
Anne Durez Année Lumière
LIENART éditions, Montreuil-sous-Bois, 2011. 96 p., ill. coul., 22x22 cm, 25 euros.
Anne Durez, Année Lumière : un livre d’une touchante et troublante beauté. D’abord par sa prise en main. Un objet doux, bleu, carré sur la couverture duquel se dessine dans une palette de gris bleutés un horizon. C’est une image extraite de sa vidéo Année Lumière qui donne son titre au livre. Et l’on ouvre ce livre sur des pages soyeuses, translucides - presque un papier bible –qui incitent à la délicatesse. Le lecteur perçoit d’emblée la dimension méditative de ce qui va lui être donné à pénétrer. De page en page le travail d’Anne Durez se donne à voir. Le livre est fait en deux parties, la première qui présente le film Année Lumière de 2007- partie introduite par un remarquable texte de Gilles A. Tiberghien - réalisé dans le cadre d’une résidence Villa Médicis Hors-les-murs. Hors les murs certes, surtout hors limites. Ou presque.
Anne Durez part trois mois aux confins de l’Europe : « De février à mai 2005, j'ai vécu cette période que l'on appelle l'hiver éclairé, en fin de nuit polaire et jusqu'au jour continu, sur l'Archipel du Svalbard (Spitzberg), la terre habitée la plus proche du Pôle Nord. » Cette fine lumière bleue qui jalonne tout le livre met aussi en lumière la porosité des relations que Anne Durez tisse entre le corps et le paysage. Le paysage apparait ici comme un autoportrait. Le paysage façonne la femme qu’elle est, il s’inscrit en elle, en modèle les formes, lui impose les limites toujours repoussées de son corps.
La seconde partie du livre, préfacée par Jean-Marc Huitorel, se nomme « Un silence à faire crier les pierres ». Comme une autre voie - ou bien devrions-nous écrire « voix »- de métamorphoses pour cette femme endormie en chien-de-fusil. L’image de la belle endormie- le long d’un rivage métaphorique ou réel (Donnant 1, S’ils se taisent) – est chaque fois contextualisée dans des situations qui violent les limites de sa corporéité. Un corps que la vie met en éveil et au cœur duquel retentit un nouveau timbre de voix.
Le livre s’offre comme une méditation sur la métamorphose, les états de ruptures et de continuité, les états d’éveil et de renaissance. Dans ces différents temps du livre, Anne Durez témoigne des liens ténus entre l’imaginaire et la réalité où les superpositions de perceptions ouvrent les voies de cheminements possibles. Si ce livre rassemble- telle une monographie- les œuvres d’Anne Durez, il fait surtout lui-même œuvre.
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