mardi 10 novembre 2009

Ola Kolehmainen, Search of Mastery III

Par Laurence Gossart

Le dispositif présenté à la galerie Fiat en 2006 avait été conçu par l’artiste finlandais Ola Kolehmainen spécialement pour ce lieu. L’exposition se composait de cinq photographies de grand format qui représentent des façades d’immeubles contemporains dans lesquelles se reflètent le ciel et les bâtiments qui leur font face. Par le jeu multiple des cadres, Ola Kolehmainen tentait de «faire ressentir au spectateur sa] propre expérience cathartique de l’espace». Le cadre qui circonscrit un espace, une scène, une action, est aussi celui des photographies dont chacune renferme une multitude d’espaces délimités par des fenêtres. Sorte de percées lumineuses dans ces lieux quasi aveugles, les fenêtres n’ouvrent pas sur des espaces perspectivistes dotés d’un point de fuite ou d’une ligne d’horizon. Il s’agit de photographies de bâtiments dont les façades de verre reflètent d’autres architectures et qui se présentent frontalement dans toute leur monumentalité. La mise en abîme créée par cette multiplicité de fenêtres permet de passer progressivement de l’une à l’autre, jusqu à des univers à la fois clos et très ouverts: des ciels dont la diversité de bleus ordonne et compose l’espace. Search for Mastery III, qui semble renvoyer à la Vue de Delft de Vermeer, témoigne d’une recherche analogue de saisie de la lumière et d’expression des sensations colorées. Telles d’immenses miroirs déformants, les façades vitrées offrent de nouvelles possibilités de perception de la réalité et ancrent l’œuvre dans la continuité de l’histoire de l’art. De fenêtre en fenêtre, de carré en carré, les volumes des architectures sont suggérés et fragmentés à la fois, fixés dans un temps et animés de reflets changeants. Par ces différents jeux de lumières, de cadres et de miroirs, Ola Kolehmainen transforme les espaces tridimentionnels en plans et la réalité en jeux de couleurs et de lignes abstraits qui ne sont pas sans évoquer Mondrian. Les miroitements sont aussi renforcés par la présentation des images : montées sous une surface de plexiglas très brillante elles se reflètent aussi entre elles, inscrivant ainsi le spectateur au cœur du dispositif. Par l’entrecroisement des façades, de l’espace réel et des images, l’artiste démultiplie notre appréhension de la ville. En agrandissant des fragments jusqu à la démesure il crée une poésie, une sorte de voyage entre l’intérieur et l’extérieur des bâtiments. Reflet de la modernité et un signe vers l’histoire de l’art, l’installation est ouverte à la dimension onirique et sensible de l’homme.
L.G.

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